L’apiculture représente au Niger, un potentiel économique important pour le développement rural et la sécurité alimentaire. Avec des initiatives en cours notamment à Yélou dans la région de Dosso, l’apiculture tend à s’associer à l’agriculture apportant ainsi aux paysans un production locale de miel qui peut être non seulement consommé au plan local, mais également vendu sur les marchés de la région et du pays. pour renforcer les pratiques apicoles traditionnelles et développer de nouvelles opportunités. Immersion dans le bassin agricole de Bandé au Sud de Zinder, riche de son miel de qualité naturelle.
Cette immersion a été opérée par Dr Haboubacar Maman Manzo, Docteur en Sciences Agronomiques et Ingénierie bio(Ph.D), Enseignant Chercheur à l’Université Boubakar Ba de Tillaberi au Niger, qui nous livre ici la quintessence de ses observations :
« En cette première decade du mois de juin 2025, nous sommes au début de la grande campagne agricole pluviale au Niger et partout au Sahel.
Les premières pluies tombées en fin du mois de mai dernier et au début du mois de juin en cours ont permis d’effectuer le semis. La hauteur des pluies a été suffisante (cas de Damagaram Takaya avec 99,4 mm enregistres en fin mai 2025, contre 26 mm en 2024 à la même periode, s’agissant de la première pluie tombée) dans la région de Zinder y compris dans la Commune de Bandé.
Aussi, dans cette bande agricole Sud du Niger, la plupart des postes pluviométriques sont largement en excès par rapport à la moyenne des dix dernières années (cf Meteo Nationale, Mai 2025).
C’est dans ce contexte agro-meteorologique favorable et porteur d’espoir que nous avons fait immersion dans le Canton de Bandé, Département de Magaria en région de Zinder, pour à la fois un suivi de l’installation de la campagne agricole pluviale et la connaissance du fonctionnement des systèmes agricoles qui caractérisent le bassin de Bandé, particulièrement l’Apiculture qui est une activité propre de la zone, transmise de génération en génération.
Notre immersion a démarré avec la visite des exploitations du Chef de Canton de Bandé, un des grands exploitants et producteurs agro-pastoraux au Niger, qui nous a fait l’honneur de nous amener visiter son splendide verger où la fruiticulture a été développée avec la plantation des milliers de plants de manguiers, citronniers, anacardiers en intégré avec l’aviculture, la pisciculture, l’élevage et l’écotourisme (autruches, reptiles, tortues et autres espèces fauniques).
C’est une initiative propre de référence qui doit servir d’école et de musée vivant pour la promotion du développement agricole, des bonnes pratiques porteuses d’eco-bénéfices et d’éducation au développement durable et inclusif au Niger et dans les pays du Sahel.
En plus de ces phases d’observation in situ, nous sommes penchés sur l’étude du système fonctionnel actif du moment dans la zone de Bandé, sur lequel s’adonnent les acteurs communautaires et villageois, pour se procurer les moyens leur permettant de s’apprêter aux préparatifs de la campagne agricole pluviale qui vient de démarrer. C’est de là que débute notre investigation sur l’Apiculture dans cette zone de Bandé suivant le transec Nord – Ouest et Sud – Est, traversant Bandé le Chef lieu du Canton.
L’Apiculture à Bandé dans la région de Zinder
Nous restons dans les terroirs de Bandé dans le departement de Magaria, region de Zinder, pour la suite des investigations de recherche sur l’Apiculture.
Faut il le rappeler, le Canton de Bandé est un enorme bassin de production du miel dans notre pays le Niger, mais tres peu connu et sous valorisé.
Les activités apicoles dans cet environnement à forte densité humaine et floristique, constitué par des arbres et arbustes endémiques comme le Faidherbia albida (gao), l’Anogeissus leiocarpa (marke), le Vitex doniana (Doumniya/Boyi), la Sclerocarya birrea (Daniya/Loulaye), le Guiera Senegalensis (Shabara), le Combretum micratum (Gueza), etc, sont des ressources floristiques mellifères, butinées ( exploitées ) par les abeilles élevées suivant des pratiques traditionnelles relayées de père en fils dans les villages de Bandé, plus connus pour leur maitrise des techniques apicoles, dont le nom est indissociable de tous les superlatifs rappelant le miel et ses vertues. C’est le cas de Garin Lami ou village du goût.
La production du miel et des autres produits apicoles, l’élevage des abeilles et ses modes de conduite, la fabrication des ruches et leur mise en exploitation, sont le patrimoine immateriel et la richesse du savoir faire en production du miel des villages de Garin Lami, koukouyoyi Gaounawa Djerma et bien d’autres villages du Canton de Bandé au Sud du Niger, dopés par les demandes en miel du grand marché du Nigeria voisin qui l’éxporte en Arabie Saoudite et à l’International.
L’Apiculture est une activité agricole pratiquée toute l’année dans notre zone d’investigation. La quantité et la qualité du miel produit dependent de l’étendue de la floraison, selon les especes vegetales en presence et la saison en cours dans les terroirs du Canton de Bandé, nous a affirmé un des apiculteurs du village de Koukouyoyi.
Les abeilles sont élevées dans des fabriques en pailles, ici en tiges d’Adonsonia digitata (gambaa) bien tressées en forme de tronc d’arbre creux avec deux portes devant et derriere fermées, laissant des petits trous par où vont passer les abeilles. Ces ruches (maisons d’abeilles) sont placées sur des arbres offrant un bon feuillage et un bon support sur lequel sera déposée la ruche, sans risque de la faire tomber ou de l’exposer aux intempéries (vent, soleil et pluie).
Dans les villages de notre zone d’études, les ruches sont pour la plupart accrochées sur les grands arbres bien feuillus comme le Calotropis procera (kalgo/Kossaï). Après l’installation de la ruche, la domiciliation des abeilles relève d’un autre savoir faire, que seuls les initiés réussissent dès les premiers jours de la pose de la ruche.
Selon nos constats de terrain, les apiculteurs des villages de Bandé exploitent individuellement pris, un parc de ruches comprenant 15 à 45 ruches éparpillées dans l’espace territorial du village sur les arbres se trouvant dans leurs champs où les champs d’autrui qui, connaissant l’importance des abeilles pour la pollinisation des plantes, demandent à l’apiculteur de poser ses ruches dans leurs champs.
Lors de notre séjour dans ce bassin apicole du centre-Sud Niger, nous avons pu observer les techniques de recolte du miel, participer a son extraction par filtrage et apprécier la qualité du miel récolté en le dégustant savoureusement.
C’est sans commentaire, la zone de Bandé à le miel le plus naturel et certainement le meilleur du Niger.
Pour le reste, sachez que le miel est un produit alimentaire noble qui vient, par son importance nutritive, en 2 ème position après l’eau et devançant le lait pour sa contribution a la bonne santé et au bien être de l’homme.
Au vue de son importance, sa production doit être suivie, surveillée et strictement contrôlée. Tout comme le miel qu’elles produisent, les abeilles doivent aussi bénéficier d’une protection et d’une observation constante de la part des autorités et des responsables du secteur, car leur protection est une garantie pour la sauvegarde de notre Environnement et toutes ses composantes dont la biodiversité faunique et floristique.
A retenir enfin, l’Apiculture est une activité qui contribue à la lutte contre la desertification et le changement climatique en favorisant et accelerant la régénération des plantes à travers leur pollinisation par les abeilles ».
Selon le Réseau des Chambres d’Agriculture du Niger ( RECA), « en plus d’offrir des produits à forte valeur ajoutée comme le miel et la cire, l’apiculture contribue à l’accroissement de la production et de la productivité des terres agricoles et forestières grâce à la pollinisation des fleurs provoquée par la visite des abeilles ». Le RECA ajoute que « De par ses conséquences écologiques positives (pollinisation des fleurs donc favorise la production et la vie des plantes), elle permet d’aborder avec aisance les thèmes relatifs à la préservation de l’environnement et au reboisement avec les populations ». En conclusion, estime le RECA, « Sa promotion sera donc une solution pour la protection des ressources naturelles de la réserve de biosphère transfrontalière et pour la réduction de la pauvreté dans les communautés riveraines. »
Amadou Garé, en collaboration avec Dr Haboubacar Maman Manzo, Docteur en Sciences Agronomiques et Ingénierie biologique (Ph.D), Enseignant Chercheur à l’Université Boubakar Ba de Tillaberi au Niger
16 juin 2025.